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A la découverte de la Flore du Parc - Saison 2 - Episode 5 : La combe verte et la forêt du Cougnet

Flore
Pour la seconde année consécutive, partez à la découverte de la flore du Parc avec notre garde moniteur Emeric Sulmont ! L’occasion de découvrir des espèces remarquables, rares ou indicatrices à observer avec passion et bienveillance.

La forêt en libre évolution (FLE) du Cougnet sur Altier est mitoyenne d’un projet de Réserve Biologique Intégrale sur des parcelles en forêt domaniale du mont Lozère entre les ravins du Cougnet et du Prat Marquès. Une riche flore mycologique s’y développe comme l’a déjà mis en évidence Gilles Corriol à la fin des années 90, inventaire qui a été complété par ceux plus récents menés par l’ONF (Gérald Gruhn).

Côté flore vasculaire de nombreuses espèces remarquables y sont connues : Chèvrefeuille des Alpes, Groseiller des rochers, Moschatelline, Racine de Corail, Laitue de Plumier, Cirse erisithale, Dorine à feuilles alterne, Sedum alpestre, Cardamine à 5 folioles… La bryoflore et les lichens ont également étaient étudiés et confortent l’importance de cette entité pour la conservation d’un patrimoine botanique remarquable à l’échelle du Massif Central. L’idée de cette sortie était à la fois d’observer quelques unes des raretés connues de la forêt de Cougnet tout en complétant la prospection sur la Combe verte et le couloir intermédiaire en forêt privée entre Cougnet et Bois Noir.

 

[ Combe verte et la forêt du Cougnet, Altier (48), le 3 juin 2021 ]

Nous démarrons depuis la piste forestière dite "des harkis" entre Peyre Plantade et Chaud Clapier, et nous observons sur les bords de la piste l’Astérocarpe faux-sésame (Asterocarpus sesamoides) une petite résédacées d’altitude, typique des arênes granitiques. Elle est accompagnée de la Cardamine à feuilles de réséda (Cardamine resedifolia), elle aussi alticole et typique des affleurements rocheux ou des arènes.

 

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Cardamine à feuilles de réséda © Emeric SULMONT - Parc national des Cévennes

 

Les pelouses à nard en mosaïque avec des landes subalpines à callune et myrtilles abritent ici quelques tourbières encore très discrètes, où l'on observe la Potentille dorée (Potentilla aurea), la Saxifrage étoilée (Micranthes stellaris) et la Pédiculaire des bois (Pedicularis sylvatica).

 

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Micranthes stellaris © Yves Maccagno - Parc national des Cévennes

 

Nous suivons le ruisseau du Péjo qui traverse ici une plantation d’épicéas très dense peu propices aux plantes remarquables. En passant la Combe verte pour rejoindre le Cougnet, nous longeons une piste enherbée, lieu de refuge anecdotique du Liondent des Pyrénées et de l’Arnica des montagnes, comme sur les pistes de fond parcourant la pessière du Col de Finiels où la quantité de pieds d’Arnica colonisant les anciens chemins forestiers est loin d'être négligeable (plusieurs milliers de pieds).

 

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Arnica des montagnes © Emeric SULMONT - Parc national des Cévennes

 


En quittant la pessière, nous rejoignons la hêtraie ancienne qui dans ce versant nord en libre évolution montre quelques espèces remarquables typiques : Lichen pulmonaire, Mousse à manchon, Amadouvier, Peltigère des collines... Ces derniers colonisent surtout les vieux sujets tordus.

Nous continuons vers une station connue de Chèvrefeuille des Alpes et de Groseillier des rochers. En chemin nous observons quelques draperies d’Usnée (Usnea intermedia), rarement abondant dans le Parc national des Cévennes, cantonné aux secteurs à hygrométrie moyenne élevée (zone à brouillard fréquent notamment). Un longicorne posé sur une feuille de Seneçon des bois (Senecio ovatus) attire notre attention, il s’agit (après un échange avec le groupe coléoptère) de Agapanthia cardui.

 

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Agapanthia cardui sur Senecio ovatus © Emeric SULMONT - Parc national des Cévennes

 

Nous observons sur bois mort de sapin au sol, la Buxbaumie verte, une espèce indicatrice d’une relative abondance de ce compartiment écologique de la forêt. Plusieurs champignons confirment cet intérêt : le polypore du hêtre (Inonotus nodulosus), le polypore du sapin (Fomitoporia hartigii), et plus commun le polypore marginé (Fomitopsis pinicola). Une mousse qui forme des draperies sur les hêtres s’ajoute à ce cortège d’espèce indicatrice de longue continuité ou de forêt mâture : Neckera pumila.

 

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Inonotus nodulosus © Emeric SULMONT - Parc national des Cévennes

 

Côté vasculaire l’Actée en épi , la Cardamine à 5 folioles (Cardamine pentaphyllos) et la Fétuque des bois (Festuca altissima = Drymochloa sylvatica) indiquent plutôt le caractère neutrophile ou acidicline du sol forestier.

En traversant le Cougnet, nous tombons sur un boisement spontané riche en Bouleau et Noisetier. C’est dans ce boisement qu’Hervé Caroff et Philippe Argoud ont découvert récemment du Chaga (Inonotus obliquus), un polypore aux vertus médicinales extra-ordinaires et qui par ailleurs est indicateur de boulaies sénescentes au cortège de coléoptères particulièrement riche.

 

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Inonotus obliquus © Emeric SULMONT - Parc national des Cévennes

 

Le sous-bois est couvert par une fleur très discrète dont le feuillage rappelle l’Anémone sylvie (mais cuite à la vapeur) : la Moschatelline (Adoxa moschatellina).

 

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Adoxa moschatellina © Emeric SULMONT - Parc national des Cévennes

 

Dans une clairière ensoleillée quelques fourmilières de Formica sanguinea (au comportement esclavagiste assez original) ainsi que quelques mues de Cigale des montagnes (Cicadetta montana) sont observées. Cette dernière (en régression en Europe) se nourrit entre autres de bouleaux, d'hêtres, d'aubépines ou de noisetiers, tous présents sur le site.
Nous retraversons le Cougnet pour remonter le long de la rive gauche du ruisseau de Fréjeyre qui est d'ailleurs bordé d’une végétation incomplète de mégaphorbiaie (friche humide).

On y trouve tout de même la Cardamine à 5 folioles, le Groseiller des rochers, la Parisette et l’Adenostyles à feuilles d’alliaire. Plusieurs pâtures dans le vallon abritent aussi quelques espèces remarquables, outre le Gaillet du Piémont (Galium pedemontanum), le Crépis mou (Crepis mollis) fait figure d’espèce rare et méconnue dans les pâtures et prairies du Mont Lozère.

 

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Parisette © Emeric SULMONT - Parc national des Cévennes

 

Nous atteignons pour terminer la sortie sur une nardaie « riche » pâturée au cortège typique. Outre de nombreux lézards vivipares, Arnicas et Trèfles des Alpes, le pâturin violacé (Bellardiochloa violacea) est identifié. Cette dernière espèce est à considérer comme "relique" (issues des périodes passées plus froides) des pelouses sommitales du Mont Lozère.

 

 

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Bellardiochloa violacea © Emeric SULMONT - Parc national des Cévennes

 

J’espère que vous avez apprécié cette petite balade botaniste !

Au Parc, nous sommes convaincus que c’est en transmettant nos observations et nos découvertes que nous pourrons apprécier ensemble l’extraordinaire biodiversité du territoire. Alors surtout, n’oubliez pas, ces trésors sont fragiles et il est de notre responsabilité à tous de les protéger pour qu’ils puissent continuer à nous émerveiller !

 

 

Pour aller plus loin :

 

Les autres épisodes de la série "A la découverte de la flore du Parc" :

Saison 2

Saison 1

 

 

 

Sauf mention contraire, les photos de cet article ont été prises par Emeric Sulmont - Parc national des Cévennes